dimanche 14 mars 2021

l'Armorial de La Planche - 1669 - Gouvernement de Provence - Sénéchaussées de Digne et de Forcalquier - 2ème partie

 S   uite de la visite d'un des plus anciens manuscrits répertoriant des armoiries de villes et de villages de France, dessinées à la plume et peintes à l'aquarelle, antérieur de trois décennies à l'Armorial Général de France de Charles d'Hozier ! Voir la description initiale : →
  Nous poursuivons avec la découverte du "livre" (c'est l'appellation donnée à une section d'un manuscrit, qui est lui-même divisé en chapitres) consacré au Gouvernement de Provence. Après les premiers chapitres consacrés aux Sénéchaussées d'Aix, de Brignoles, de Marseille, de Toulon, de Draguignan et de Grasse nous abordons deux nouvelles sénéchaussées: celle de Digne et celle de Forcalquier.  Ces subdivisions administratives de l'Ancien régime, abrogées sous la Révolution, ont servi de base pour former en 1790 le département des Basses-Alpes, renommé plus tard, en 1970, Alpes-de-Haute-Provence. Quelques cantons seront détachés à l'ouest pour compléter le département du Vaucluse (Apt, Sault, Gordes), ou la Drôme (Séderon, Rémuzat), au nord: les Hautes-Alpes (Barcillonnette) et à l'est celui des Alpes-Maritimes (Guillaumes). Voici donc le quatrième chapitre consacré aux deux entités réunies par l'auteur du manuscrit.


      Revenir à l'épisode précédent →

 

 Voici l'extrait d'une carte datant de la fin du XVIIIe s. , donc postérieure d'un siècle, mais sur laquelle j'ai reconstitué les limites administratives de notre région :

 Vous pouvez cliquer sur toutes les images pour les agrandir :
 


 
 
 
 
  Les fragments de manuscrits proviennent à nouveau du Volume II. Pour enrichir l'étude, j'ai mis en bonus l'extrait équivalent dans l'Armorial Général de France* (1696-1711), établi par Charles-René d'Hozier, et comme auparavant, j'ai placé le blason actuel en-dessous, pour comparer les différences ou au contraire la constance des figures dans le temps.

(*)  Armorial Général de France  -  volume XXIX  -  Provence 1ère partie  
       Armorial Général de France  -  volume XXX  -  Provence  2e partie  (BNF Paris)
 

 Toujours en raison de son exceptionnelle densité, ce sixième chapitre de la Haute-Provence fait l'objet de deux articles, tout en maintenant une cohérence géographique. Ce second volet est donc consacré globalement au contour de l'ancienne sénéchaussée de Forcalquier. 

 

Forcalquier
(Alpes -de- Haute - Provence)

  Le blason fut donné au début du XIIe siècle à la ville par le comte de Provence Raymond-Bérenger en même temps qu'un certain nombre de droits et de privilèges (voir historique → ICI). Les armes de la cité s'apparentent donc à celles du comte et de la dynastie des Barcelone / Aragon  (d'or à quatre pals de gueules), mais avec une brisure spécifique et astucieuse, en supprimant un pal et en inversant les émaux or/gueules, ce qui donne l'impression de toujours voir les quatre pals de gueules avec de l'or intercalé, les couleurs de l’ancien comté de Provence !


Sisteron
(Alpes -de- Haute - Provence)

 A la fin du XVIIe siècle, on peut donc trouver sur ces manuscrits le blason de cette ville, soit avec un champ d'azur, pour Pierre de La Planche, soit un champ de gueules dans l'Armorial Général de France. Les figures, toutes d'or, sont presque identiques, même si disposées différemment, à part le besant en pointe de La Planche, alternant avec deux annelets de d'Hozier, qui sont toujours d'actualité. L'origine et la symbolique de ces armoiries demeurent obscures. Je n'ai trouvé aucune documentation s'y rapportant. 


Apt (Vaucluse)

 Voir encore une fois un bel exemple de constance d'un blason à travers les siècles. L'épée fait référence à celle qui fut donnée à la ville en signe de loyauté, et ce depuis l'époque antique, par Jules César, en hommage à la fidélité des habitants d'Apta Julia. Cette hypothèse est rapportée par Camille Moirenc dans son "Essai historique sur le blason de la ville d'Apt", édit. Marseille, 1847.



Riez
(Alpes -de- Haute - Provence)


 Ici encore, la documentation manque pour établir une date d'adoption, une origine et la symbolique de ces armoiries. Certains ont vu une similitude avec le blason de la ville de Madrid, en Espagne (voir → ICI) mais aucun lien n'a pu être établi. A noter que chez La Planche, l'ours est à senestre du pommier alors que d'Hozier l'a placé à dextre (contourné) et qu'il est communément représenté comme cela maintenant.


Valensole
(Alpes -de- Haute - Provence)


Armes parlantes : Vallis Solis en latin, également Valensolia  « la vallée du soleil » et la lettre V capitale, initiale du nom de la ville de Valensole. Simple et incontestable.


Manosque
(Alpes -de- Haute - Provence)

À travers les âges, différentes variantes du blason de Manosque ont existé, mais toutes ont un point commun : quatre mains. La plus ancienne représentation que l’on en possède et qui, à ce titre, est considérée par certains comme l’ « authentique », figure dans un livre imprimé en 1559. On y voit les paumes de quatre mains, deux droites et deux gauches, les pouces s’opposant ; « écartelé d’azur et de gueules, à quatre mains appaumées d’argent, deux dextres, posées une dans chacun des quartiers, les pouces affrontés », en langage héraldique. Sur un dessin ultérieur, daté de 1623, les mêmes mains apparaissent, accompagnées de la devise "Omnia in manu dei sunt". Cette devise est sans doute une des clés pour comprendre la signification du blason manosquin, il s’agirait d’armoiries parlantes. La proximité entre le terme latin manus (la main) et le nom de la ville au Moyen âge, Manuesca, est l’hypothèse la plus souvent envisagée pour expliquer l’utilisation de ces mains. Et pourquoi quatre ? Peut-être est-ce une allusion aux quatre quartiers du centre ancien (Palais, Martels, Payans et Hébréards) ou aux quatre portes de la ville (Saunerie, Soubeyran, Aubette et Guilhempierre). Beaucoup de mystères entourent encore ce blason ! source texte : www.ville-manosque.fr/patrimoine-tourisme/lhistoire-de-ville/armoiries-de-manosque/
  Certains blasons présentent des mains dextres, soit aux 1er et 3e quartiers, soit aux 1er et 4e. "L'Armorial des communes de Provence" (voir → ICI) donne un blasonnement "... quatre mains appaumées d'argent" mais montre un dessin avec quatre mains senestres. C'est ce dernier blason présenté qui est utilisé par la commune, bien qu'il soit considéré comme erroné par certains. Enfin, on notera que Charles d'Hozier a "inventé" un blason de manière aléatoire "Coupé: au premier d'azur à l'éléphant d'or, au deuxième d'argent au chevron de gueules", qui n'a jamais été utilisé par la municipalité. source texte : armorialdefrance.fr/page_blason.php?ville=5067


Sault (Vaucluse)

  Très souvent, on l'a déjà évoqué dans mes sujets précédents, l'auteur du manuscrit a préparé comme ici,  un emplacement pour y dessiner les armoiries des villes pour lesquelles il a rédigé un descriptif. Mais les écus sont restés désespérément vides. Nous en ignorons toujours la raison : manque d'information fiable, manque de temps, on ne le saura jamais.
   Le blason de la commune de Sault est une brisure des armoiries de la célèbre famille d' Agoult ("D'or au loup rampant (ou ravissant) d'azur armé lampassé et vilené de gueules"), une des plus anciennes familles de la noblesse provençale, qui a régné sur le pays d’Apt et de Sault durant tout le Moyen Âge. Beaucoup d'autres communes provençales ont d'ailleurs également repris ces armes comtales dans leurs blasons (Angles, Aurel, Beaumettes, Ferrassières, Lourmarin, Monieux, Revest-du-Bion, Saint-Trinit, etc...).

 

[_)-(_]



D'autres villes sont juste décrites par le texte, sans blason ni mention s'y rapportant :

Les Mées, Reillanne.

 # cependant, quelques années plus tard, ces villes (en gras, ci-dessus) ont été enregistrées et blasonnées dans l'Armorial Général de France. Leurs blasons sont toujours d'actualité, à quelques petits détails près:


Les Mées
(Alpes -de- Haute - Provence)

Reillanne
(Alpes -de- Haute - Provence)

 

# enfin, pour aller plus loin avec l'Armorial Général de France, on peut encore rajouter ces dernières localités qui dépendaient à priori de ces deux sénéchaussées, devenues aujourd'hui des communes importantes, et qui n'ont pas été mentionnées dans le manuscrit de La Planche :
Château-Arnoux, Peyruis, Oraison, Villeneuve, Sainte-Tulle, Gordes, Roussillon et Séderon .

 et leurs blasons respectifs sont, à quelques détails ou brisures près, toujours d'actualité :

Château - Arnoux
(Alpes -de- Haute - Provence)

Peyruis
(Alpes -de- Haute - Provence)

Oraison
(Alpes -de- Haute - Provence)

Villeneuve
(Alpes -de- Haute - Provence)

Sainte - Tulle
(Alpes -de- Haute - Provence)

Gordes (Vaucluse)

Roussillon (Vaucluse)

Séderon (Drôme)

Rémuzat (Drôme)


   Un très grand nombre d'autres bourgades de la région, nommées simplement "communauté du lieu de..." (Com. du lieu de...), dans les registres de l'Armorial Général de France, ont été identifiées et enregistrées avec des armoiries souvent authentiques, car transmises par les représentants légaux de ces villages, mais quelquefois attribuées d'office par défaut. Il serait fastidieux de les lister toutes ici, d'autant que certaines localités ont été absorbées par les nouvelles communes constituées après la Révolution. Toutefois vous pouvez vous amuser à les rechercher dans les ouvrages numérisés chez Gallica, dont je donne les liens ci-dessous, et accessoirement aussi dans les très intéressantes fiches listées département par département sur le site : armorial de france.fr


A bientôt pour une nouvelle série ... → ICI


Crédits :

les blasons "modernes" sont empruntés  à : armorialdefrance.fr/

les extraits des manuscrits proviennent de :
- Bibliothèque et Archives du Musée du Château de Chantilly :
   . www.bibliotheque-conde.fr/ressources-en-ligne/
- Bibliothèque nationale de France à Paris : 
   . gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k111476m/f2.item
   . gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1114770/f2.item

 💶 Appel au mécénat ou aux généreux donateurs :
 Au cours d'échanges d'informations avec les responsables de la Bibliothèque du Musée Condé, au sujet du manuscrit, il m'a été rapporté que l'ouvrage de Pierre de La Planche n'est actuellement plus exposé ni mis à disposition des visiteurs. En effet, les deux volumes du manuscrit sont en mauvais état : "la couverture", ce que l'on nomme dans le métier: les plats de reliure, sont soit partiellement,soit totalement détachés du manuscrit, ce qui nuit à sa conservation. La reliure étant en effet là pour maintenir et protéger le manuscrit.
  Si des personnes ou des entreprises sont intéressées, en mode mécénat, pour participer à la prise en charge de la restauration de ces précieux ouvrages, qu'elles prennent contact pour les modalités, avec les bibliothécaires à cette adresse mail  : bibliotheque@domainedechantilly.com
ou sinon m'écrire à : heraldexpo@orange.fr et je transmettrai à ma correspondante privilégiée.

 

             Herald Dick  
.

 


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire