vendredi 10 février 2023

Capitales du monde : Brazzaville

 N ous avons quitté l'Europe centrale, avec le précédent volet et le hasard de l'ordre alphabétique nous emmène cette fois en Afrique centrale dans un nouveau pays et sa capitale, sur les rives du grand fleuve Congo, qui sert de frontière naturelle. Nous y rencontrerons... un aventurier italien, un Makoko coiffé de plumes d'oiseaux, des éléphants, etc.

 

Le blason de Brazzaville (créé en 1950) se décrit ainsi : "Écu de type français, écartelé, au 1er de gueules au drapeau d’argent hampé d’or et posé en bande ; au 2e, d’azur au rencontre d'éléphant d’or défendu d’argent, accompagné aux cantons de quatre fleurs de lys d’or ;  au 3e, d’or aux trois plumes de perroquet de gueules posées en pal, 2 et 1 ;  au 4e, d’argent au pal de sable ".

❓ Je détaillerai un peu plus bas chacun des éléments de ce blason qui peut sembler à première vue intrigant voire mystérieux. 🚩🐘🦜‖

(🛡) Les armoiries qui représentent l'emblème officiel de  Brazzaville sont composées de l'écu décrit plus haut et qui est:
  - timbré d’une couronne de plumes de sable et de gueule aux "cauris" d’argent représentant la coiffure des rois ou "Makokos batékés".
  - supporté par deux "palmes" de sinople passées en sautoir sous l'écu.
  - le tout soutenu d'une banderole d'argent portant la devise écrite en capitales de sable: "TOUS CEUX QUI LE TOUCHENT SONT LIBRES".

❗ Là encore, quelques arguments seront nécessaires pour expliquer plus bas, la présence de ces figures étranges ainsi que cette curieuse devise.

 

  


 

🏳 Les armoiries sont déclinées en divers logos ou visuels, pour les besoins de la municipalité, que ce soit sur des supports numériques ou des supports physiques: papier, insignes, drapeaux, etc.  Un inventaire plus complet vous sera proposé plus bas.

Drapeaux ornant l'estrade lors d'une célébration officielle franco-congolaise
à l'hôtel de ville de Reims (France), en 2016 - à droite le drapeau de la municipalité 
de Brazzaville (reproduit ci-dessous) - au centre ceux des deux pays : Congo
et France - à droite : drapeau de la ville de Reims, avec laquelle Brazzaville
est jumelée depuis 1961 - photo : © www.crwflags.com

 

capitale n° 36 - Brazzaville

  Brazzaville est la capitale de la République du Congo, et la plus grande ville du pays, située au sud-est de celui-ci, sur la rive droite du fleuve Congo, au bord du réservoir naturel de Malebo (Malebo Pool), face à Kinshasa, une autre grande capitale, celle de la République démocratique du Congo.
 

Population  :  1 982 000 hab. (estimation 2019)

 Découverte par l’explorateur Pierre Savorgnan de Brazza en 1880 et baptisée Brazzaville en 1884 en son honneur, la ville est choisie comme capitale de la colonie française du Moyen-Congo en 1906, puis de l’Afrique-Équatoriale française en 1910. C’est là qu’est organisée, en 1944, sur l’initiative du général de Gaulle, une conférence posant les bases d’une nouvelle administration de l’empire colonial français. En 1960, Brazzaville devient la capitale de la nouvelle république du Congo indépendant. En 1993-1994, elle est le théâtre de la guerre civile entre partisans du président Pascal Lissouba et ceux de son prédécesseur Denis Sassou-Nguesso, et subit de nombreuses destructions.

Le pont "du 15 août 1960", viaduc à haubans qui franchit le ravin de la Glacière, sur la route de la corniche sud de Brazzaville,
inauguré en  2016 -  photo : © site www.tresor.economie.gouv.fr/Pays/CG


  Principal port fluvial du Congo, Brazzaville entretient une intense activité commerciale avec le port de Pointe-Noire, sur l’Atlantique, auquel la capitale est reliée par la voie de chemin de fer Congo-Océan, ouverte en 1946. En effet, si le fleuve Congo est navigable en amont de Brazzaville, il ne l’est plus en aval jusqu’à l’océan à cause des rapides et des cataractes infranchissables. Cela a amené à trouver dans la première moitié du XXe siècle, un moyen de transport entre le « Congo et l’Océan » pour acheminer les richesses de l’Afrique centrale, oléagineux, coton, café, cacao, bois précieux, caoutchouc, or, cuivre, ivoire… Les activités dominantes de la ville sont l’industrie alimentaire, le textile et les matériaux de construction. La ville est le siège d’une université.


carte postale moderne avec armoiries de la République du Congo , en bas à droite.



Un blason vieux de 72 ans pour une capitale fondée il y a 142 ans.
 
 Les armoiries de la ville de Brazzaville ont été adoptées le 29 septembre 1950, au cours d'une réunion de la commission municipale présidée par M. Durant, administrateur-maire. La composition de ces armoiries conçues comme emblème suivant les règles héraldiques classiques, fut faite en 1950 par Jean Glénisson, à l'époque archiviste paléographe du gouverneur général de l'Afrique Équatoriale Française. La maquette fut dessinée par Pierre Lods, alors créateur et directeur de l’École de peinture de Poto-Poto.
série de deux timbres émise en 2005 pour commémorer le 125e anniversaire de la fondation de Brazzaville
à droite, on voit la rencontre entre Pierre Savorgnan de Brazza (en uniforme) et le chef ou makoko des Batékés qui se nommait Illoô.
 qui eut lieu à Mbé, un village proche du fleuve Congo, le 10 septembre 1880.
le traité qui fut signé ce jour marqua le début du protectorat français (terme employé à ce moment, moins violent que celui de "colonisation")
sur un vaste territoire comprenant le Moyen-Congo, le Gabon et l'Oubangui-Chari (la future Centrafrique).
série de timbres émis précédemment en 1980 pour commémorer le centenaire de la fondation de Brazzaville
   
  Les éléments constitutifs de ces armoiries symbolisent la combinaison de l’emblème de la famille italienne des Comtes de Brazza Cergneu Savorgnan et des insignes des rois batékés avec qui l’explorateur humaniste et pacifiste Pierre Savorgnan de Brazza traitait le 10 septembre 1880 à Mbé. L’écu divisé en quatre, comporte les armes de Brazza en deux de ses quartiers (drapeau et pal) et dans les deux autres, une tête d’éléphant et les petites plumes rouges de queue de perroquet congolais que les vieux chefs batékés, dans les villages, piquent encore dans leurs cheveux. L'écu est orné de deux palmes vertes, surmonté d’une coiffe batéké, et le tout est soutenu d'une banderole blanche qui porte l'inscription suivante : « Tous ceux qui le touchent sont libres ». 
  Voici l'analyse en détail et la signification de toutes ces figures, l'une après l'autre:
 
Timbre italien émis en 2005 pour
célébrer le centenaire de la mort de
Pierre Savorgnan de Brazza

Quartiers 1 et 4 :  de l'héraldique européenne





Blasons de gauche à droite :  anciennes maisons de Savorgnan (drapeau) ; de Cergneu (pal de sable) et
Savorgnan de Brazzà (écartelé 1et 4 de Cergneu, 2 et 3 de Brazzà [dextrochère, bras : armes parlantes], et
Savorgnan sur le tout), toutes issues de la noblesse patricienne d'Udine (Frioul, Italie) et vassales de la République de Venise.

Quartier n°2: évocation de l'Afrique
Équatoriale française : éléphant,
fond azur et fleurs de lys !
Éléphant de forêt d'Afrique (Loxodonta cyclotis)

Perroquet gris du Gabon (Psittacus erithacus)


Quartier n°3 : plumes (rouges)
de perroquet gris (ci-contre)


portrait d'époque d'un chef (makoko) Téké
portant la coiffe traditionnelle à plumes




Cimier : coiffe des rois batékés : plumes d'engoulevent
 terminées par des cauris (coquillages)

Cauris ou porcelaines (Cypraea moneta), coquillages
 employés comme monnaie d'échange et en ornements

série de timbres émis en 2015 par le Niger montrant plusieurs espèces d'engoulevents (oiseaux du genre Caprimulgus)
présents en Afrique et dont certaines possèdent de longues plumes utilisées comme ornements

  Enfin, la banderole sur laquelle il est écrit : « Tous ceux qui le touchent sont libres », ajoutée par la Commission municipale en 1950 tient pour origine une jolie histoire que je ne résiste pas à vous relater, vraie ou inventée, elle n'en est pas moins belle.
  Voici les sources de cette devise extrait du livre sur De Brazza écrit par le Général de Chambrun, beau frère de De Brazza : « Une nuit, De Brazza fut réveillé par les appels réitérés d’un fugitif qui, ayant quitté un maître cruel, celui-ci ne tarda pas à réclamer sa marchandise humaine.  Fallait-il rendre le malheureux fuyard ou lui accorder asile sous les plis du drapeau ?
De Brazza n’hésita pas un seul instant d'étendre sa protection. Mais, en cette circonstance, il se montra aussi pratique qu’humanitaire et, ne voulut pas risquer de compromettre irrémédiablement le succès de son entreprise et, en affirmant les droits de propriété, il trancha la difficulté en achetant l’esclave à 400 francs, bien que le prix habituel dans ce pays fût de 2 kg de sel, d’un bassin de cuivre (Neptune) valant 1, 50 franc et d’un collier de perle (de Venise) de deux sons.
  Quand, sur le marché voisin, on apprit l’étrange nouvelle, qu’après avoir payé pour la libération d’un homme, on payait ensuite son travail, il y eut un grand émoi. Quatre malheureux d’abord, puis une vingtaine, se jetèrent aux pieds du bienfaiteur.
Alors De Brazza jugera bon de frapper l’imagination par une certaine solennité. Au milieu de son campement, il fit hisser le drapeau français et, en montrant du doigt la hampe et, il dit : « Tous ceux qui le touchent sont libres. Nous, la France, ne reconnaissons à personne le droit de maintenir un homme en esclavage ». « Au fur et à mesure que chacun s’approchait de notre pavillon, les laptots faisaient tomber les fourches du cou et brisaient les entraves des pieds. Puis, alignés, libérateur et libérés saluaient le tricolore ». source texte : www.brazzaville.cg/fr/les-armoiries-de-la-ville-brazzaville

 .


Quelques représentations du blason dans le temps, officielles ou pas... 
 
carton d'invitation de la mairie de Brazzaville avec armoiries et cachet officiel daté du 4.09.1960
Autre emblème utilisé par la
Chambre de Commerce (v.1960)
Premier timbre montrant le blason de Brazzaville, à côté du bâtiment
 futuriste de la mairie, émis par la République du Congo en 1965
Paire de timbres "armoiries" émis en 1967 et 1968 pour les deux principales
villes du Congo: Brazzaville (capitale politique) et Pointe-Noire (capitale économique)
Enveloppe Premier Jour vendue conjointement au timbre "armoiries de Brazzaville " émis en 1967.

Armoiries publiées dans "le Grand Livre
de l'Héraldique" d' Ottfried Neubecker (1977) avec
plusieurs erreurs: dans la case n°1 : la hampe
du drapeau devrait être d'or - dans la case n°2 :
 on voit 5 fleurs de lis au lieu de 4 et la couleur des
défenses de l'éléphant n'est pas différenciée.

Vestige de la mode des pin's !  fin des années 1980 / début 1990
nous l'avons déjà vu précédemment :
timbre émis en 2005 (125e anniversaire de la ville)
couverture d'un excellent livre consacré à l'histoire
de Brazzaville, publié en 2017 (Éditions Acoria)

Affiche annonçant la réunion de l'Assemblée Générale annuelle de la COSPECO
(Commission spéciale de coopération entre les villes de Kinshasa et de Brazzaville), 23éme du nom,
 qui eut lieu à Kinshasa en 2021 avec les emblèmes des deux capitales qui se font face sur le fleuve Congo.

Ci-dessus l'estrade de l'assemblée de 2021 avec les intervenants des deux  pays :  République du Congo et R.D.C.
drapeaux nationaux et emblèmes des deux capitales - photo: site © arts.cd - voir article de presse  → ICI


 

🛫  FIN DU VOYAGE : J'ESPÈRE QU'IL VOUS A DONNÉ ENVIE DE PARTIR POUR DE NOUVELLES DÉCOUVERTES.



💵 Crédits :

choix des images:
- passer votre souris sur les images pour lire les url des sites sur lesquels elles ont été empruntées

capitale précédente  →   Bratislava
capitale suivante     →  Bridgetown (plus tard !)




 

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