vendredi 14 février 2020

l'Armorial de La Planche - 1669 - Gouvernement de Champagne - Bailliage de Sens

S   uite de la visite d'un des plus anciens manuscrits répertoriant des armoiries de villes et de villages de France, dessinées à la plume et peintes à l'aquarelle, antérieur de trois décennies à l'Armorial Général de France de Charles d'Hozier ! Voir la description initiale : →

 Nous poursuivons avec la découverte du "livre" (c'est l'appellation donnée à une section d'un manuscrit, qui est lui-même divisé en chapitres) consacré au Gouvernement de Champagne. Après les premiers chapitres consacrés au Bailliages de Troyes, de Reims et de Châlons, nous nous déplaçons plus au sud, avec le bailliage de Sens, considéré comme le plus ancien de France. Sens fut réuni à la couronne en 1015, le roi Philippe Auguste y fixa en 1184 le siège d'un bailliage royal. Sens était par ailleurs le siège d'un puissant archevêché depuis le haut Moyen-Âge, dont Paris dépendait  jusqu'en 1622. Il a aussi été le plus vaste des bailliages, comprenant au plus fort de son existence, toute la haute vallée de la Seine, de Melun jusqu'à Langres. Puis, au gré des réformes, son territoire a beaucoup diminué au cours des siècles et en cette fin du XVIIe siècle, il est réduit à quatre subdivisions isolées autour des villes de Sens et de Courtenay (en pays Gâtinais), de Tonnerre, de Mussy-sur-Seine (anciennement nommée Mussy-l'Évêque) et de Vézelay. Ces anciennes circonscriptions forment aujourd'hui, une bonne partie du département de l'Yonne (créé en 1790), en y joignant les anciens pays/bailliages d'Auxerre et de l'Auxois, qui dépendaient eux, du Gouvernement de Bourgogne, la Puisaye, qui dépendait du Gouvernement d'Orléans, et aussi, nous l'avons vu récemment: le sud du bailliage de Troyes, en Champagne, avec les villes de Joigny et de Saint-Florentin, précédemment parcouru. Voici donc le quatrième chapitre, à la structure quelque peu dispersée.

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Voici l'extrait d'une carte datant de la fin du XVIIIe s. , donc postérieure d'un siècle, mais sur laquelle j'ai reconstitué les limites administratives de notre région :
 Vous pouvez cliquer sur toutes les images pour les agrandir









  Les fragments de manuscrits proviennent cette fois du Volume I. Pour enrichir l'étude, j'ai mis en bonus l'extrait équivalent dans l'Armorial Général de France* (1696-1711), établi par Charles-René d'Hozier, et comme auparavant, j'ai placé le blason actuel en-dessous, pour comparer les différences ou au contraire la constance des figures dans le temps.

(*)  Armorial Général de France  -  volume XXV  -  Généralité de Paris - volume III  (BNP Paris)


Sens (Yonne)

  Les armoiries de Sens, toujours utilisées dans la communication de la municipalité et c'est exceptionnel pour une ville de cette importance, sont très anciennes et inchangées depuis sans doute le Moyen-Âge, quand la ville a été rattachée au domaine royal, comme le montre ce champ d'azur aux six fleurs de lis d'or.
 Bizarrement, dans l'Armorial Général de France (registre de Paris, tome III), Charles d'Hozier a oublié ce blason séculaire, ainsi que la ville elle-même. Mais parmi d'autres entités du moment, le corps du bailliage et celui de l'élection ont été blasonnés, avec les armes royales, logiques pour une administration du royaume (dans la France de l'Ancien Régime, l'élection était une juridiction de l'impôt; plusieurs élections formaient une généralité). 



Villeneuve -sur- Yonne (Yonne)

  La ville s'est appelée Villeneuve-le-Roy jusqu'à la Révolution (mais il ne faut pas confondre ce toponyme avec celui de la commune actuelle de Villeneuve-le-Roi dans le département du Val-de-Marne, qui n'a absolument rien à voir). Villeneuve-le-Roy / sur-Yonne est née de la volonté du roi Louis VII le Jeune (1137-1180) qui désirait, en 1163, protéger les limites du royaume de France face au Comté de Champagne. En 1792, elle est renommée Villeneuve-sur-Yonne, nom qu'elle a conservé jusqu'à aujourd'hui.
  La ville médiévale était ceinte de remparts avec quatre portes fortifiées, deux subsistent encore aujourd'hui. Les différents blasons de la ville n'en montrent que trois, symbolisées sous différentes formes :  châteaux ou tours.



Courtenay (Loiret)

  Ces armes sont celles de la maison de Courtenay, dont plusieurs membres ont été sacrés empereurs latins d’Orient. Le manuscrit montre les armes de la "branche capétienne" des Courtenay, apparue en 1150 avec le mariage d'une héritière avec un fils cadet du roi Louis VI le Gros: Pierre de France.
  Le blason de la ville actuel reprend aujourd’hui ces armes nobiliaires, celles de la 1ère maison, couronnées de remparts et ornées de rameaux de chêne et d’olivier, symboles civils de la cité, de puissance, d’invincibilité et d’immortalité.   source texte : www.courtenay45.fr



Mussy -sur- Seine (Aube)

  Dès le XIIe siècle, les évêques de Langres possédaient une résidence d'été à Mussy et en acquirent peu à peu la seigneurie (l'auteur du manuscrit le précise dans son texte descriptif). Rien d'étonnant donc, à ce que la petite ville porte un blason découlant de leurs armes, tout comme la ville de Langres, que nous verrons dans un prochain chapitre. Toutefois le nombre de fleurs de lis est limité à quatre, à la place du semé du blason des évêques. C'est sous cette forme, semble-t-il, qu'ils étaient représentés sculptés sur les murs des remparts, avant la Révolution. 
source info : relais-livre.mussy.pagesperso-orange.fr/Patrimoine/Blason.htm



Tonnerre (Yonne)

 Comme pour Courtenay plus haut, la ville de Tonnerre a adopté depuis longue date, le blason de ses anciens seigneurs : les comtes de Tonnerre, mais plus particulièrement la célèbre maison de Chalon (blason : "de gueules à la bande d'or") qui hérita du comté au début du XIVe siècle.



Vézelay (Yonne)

   La commune est universellement connue pour la basilique Sainte-Marie-Madeleine, chef-d'oeuvre de l'art roman bâtie sur un site élevé extraordinaire, appelé " la colline éternelle ", le tout classé au patrimoine mondial de l'humanité par l'UNESCO.  Cette église faisait partie d'un grand établissement abbatial, établi dans ces lieux depuis l'an 859 et placé sous la protection de la Vierge Sainte Marie. Au XIe siècle, l'abbaye reçoit les reliques de Marie-Madeleine. Des miracles se produisent : les pèlerins affluent et font de Vézelay un point de passage important sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle. En 1050, l'abbaye, passe ainsi sous le patronage de Marie-Madeleine et quelques années plus tard le pape reconnaît solennellement les reliques. Bernard de Clairvaux (saint Bernard) y vient pour prêcher la 2e croisade en 1146, puis Philippe Auguste et Richard Cœur de Lion, y passent avant leur départ pour la 3e croisade en 1190, et encore Louis IX en 1248.
  En 1279, la “reconnaissance” des reliques de Marie-Madeleine à Saint-Maximin en Provence signe les débuts d’une rapide et profonde décadence des pèlerinages et de l’abbaye de Vézelay. En 1537, le pape Paul III sécularise l’abbaye: les moines sont remplacés par quinze chanoines séculiers, placés sous l’autorité d’un abbé nommé par le roi. En 1569 , durant les guerres de religion, elle est mise à sac par les Huguenots. En 1760, à l’abandon, les bâtiments abbatiaux sont partiellement vendus et démolis. Et en 1790, le collège de chanoines est supprimé, et l’église, abbatiale puis collégiale, devient paroissiale. Les vestiges restant de l’abbaye sont vendus et rasés. Elle subira par la suite de nombreuses dégradations avant d'être sauvée au XIXe siècle par Eugène Viollet-le-Duc , à l’instigation de l’écrivain Prosper Mérimée, inspecteur des Monuments historiques.
source textes : www.basiliquedevezelay.org
 Les blasons, dessinés de manière différente sur les deux manuscrits concernent donc les établissements religieux avec la symbolique inhérente à Sainte Marie-Madeleine : le vase d'onguent, du fait qu'elle fut l'une des femmes qui apportèrent des parfums au tombeau de Jésus et les larmes qu'elle pleura sur le corps du Christ. Le blason moderne, datant de la fin du XIXe siècle, comporte dans le chef, outre les larmes de Marie-Madeleine, la châsse romane qui contenait les supposées reliques de la sainte.



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  D'autres lieux ou villes sont juste décrits par le texte, sans blason ni mention s'y rapportant : Sainte-Colombe (abbaye, commune de Saint-Denis-lès-Sens ), Pont-sur-Yonne, Villeneuve-la-Guyard, Vauluisant (abbaye, commune de Courgenay), Molesmes, Ancy-le-Franc, Cruzy (-le-Châtel), Ligny-le-Châtel.


 # cependant, quelques années plus tard, certains autres établissements religieux (en gras, ci-dessus) ont été enregistrés et blasonnés dans l'Armorial Général de France.






# et pour aller plus loin avec l'Armorial Général de France, on peut encore rajouter, à partir d'un autre établissement catholique, cette dernière ville qui dépendait de ce bailliage, et devenue aujourd'hui une commune, qui n'a pas été mentionnée dans le manuscrit de La Planche :
Chablis.

Chablis (Yonne)


A bientôt pour une nouvelle série ... → ICI


Crédits :
les blasons "modernes" sont empruntés  à : armorialdefrance.fr/

les extraits des manuscrits proviennent de :
- Bibliothèque et Archives du Musée du Château de Chantilly :
   . www.bibliotheque-conde.fr/ressources-en-ligne/

 - Bibliothèque nationale de France à Paris : 
   . gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k111473g/

💶 Appel au mécénat ou aux généreux donateurs :
 Au cours d'échanges d'informations avec les responsables de la Bibliothèque du Musée Condé, au sujet du manuscrit, il m'a été rapporté que l'ouvrage de Pierre de La Planche n'est actuellement plus exposé ni mis à disposition des visiteurs. En effet, les deux volumes du manuscrit sont en mauvais état : "la couverture", ce que l'on nomme dans le métier: les plats de reliure, sont soit partiellement,soit totalement détachés du manuscrit, ce qui nuit à sa conservation. La reliure étant en effet là pour maintenir et protéger le manuscrit.
  Si des personnes ou des entreprises sont intéressées, en mode mécénat, pour participer à la prise en charge de la restauration de ces précieux ouvrages, qu'elles prennent contact pour les modalités, avec les bibliothécaires à cette adresse mail  : bibliotheque@domainedechantilly.com
ou sinon m'écrire à : heraldexpo@orange.fr et je transmettrai à ma correspondante privilégiée.


             Herald Dick  
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