lundi 19 mars 2012

Héraldique médiévale : l'Armorial des Chevaliers de la Table Ronde

Les études héraldiques d'après les manuscrits médiévaux sur la légende ou plutôt... les légendes arthuriennes sont  un sujet inépuisable ...  
Superbe miniature extraite du manuscrit enluminé "Lancelot-Graal" (~1301/1400) :
le combat de Lancelot contre Gauvain
cote Ms fr.120 - folio n°590v - Bibliothèque Nationale de France - Paris
notez la belle ville fortifiée dans l'arrière-plan,  et le réalisme cru de la scène 
avec les traces de sang sur les armures et au sol !  

Au premier plan, les deux combattants :
  • Lancelot , à gauche, portant l'écu : d'argent (diapré) à trois bandes gueules
  • Gauvain , à droite, portant l'écu : de pourpre à l'aigle bicéphale d'or
Les chevaliers qui observent à gauche (ce sont trois cousins de Lancelot) :
  • Blioberis : d'argent semé de tourteaux de sable, à trois bandes de gueules brochantes
  • Bohort : d'hermine à trois bandes de gueules.
  • Lionel : d'argent semé d'étoiles de sable, à trois bandes de gueules brochantes
 Les chevaliers qui observent à droite :
  • Arthur : d'azur à trois couronnes d'or)
  • Perceval : de pourpre semé de croisettes d'or
  • Yvain : d'azur au lion d'or 

 Parmi les innombrables armoriaux compilés au Moyen-âge , un bon nombre sont consacrés à la Légende du Roi Arthur et des chevaliers de la Table Ronde. Ces personnages, issus de romans médiévaux étaient très populaires dans toute l'Europe. En France plus particulièrement, c'est le grand poète Chrétien de Troyes (~1130-1185) qui a imposé ce sujet aux rares personnes qui avaient la capacité de lire à cette époque. Il s'en dégageait  un idéal de la chevalerie, mêlé de piété, que tous les combattants potentiels voulaient atteindre. L'honneur, la loyauté, le courage,  l'amour courtois, la foi sont les notions de base de la chevalerie.  Mais il y avait aussi des "méchants" sans scrupules que les bons chevaliers se devaient de combattre et d'occir , tels Mordred ou Méléagant.
 De cette identification à des personnages imaginaires, la conséquence était qu'on leur attribue des armoiries,  au même titre que les vrais chevaliers , à partir du XIIIè siècle.  Lesquelles ont un peu varié au cours des siècles, même pour les chevaliers les plus importants. Car on a recensé (Michel Pastoureau) jusqu'à 178 armoiries différentes pour des personnages parfois très obscurs issus des récits. A l'opposé et bizarrement, certains grands de la Légende n'ont jamais reçu d'armoiries , tels Merlin, Uther Pendragon ( le père d'Arthur), Méléagant , etc... ni Guenièvre, Iseut ou Morgane pour les femmes.

Voici 5 pages armoriées extraites d'un manuscrit conservé à la BNF - Bibliothèque de l'Arsenal à Paris : l'Armorial des Chevaliers de la Table Ronde (~1460-1470) cote Ms 5024.

Ms 5024 folio n°1

  • Galaad : d'argent à la croix de gueules
  • Perceval : de pourpre semé de croisettes d'or
  • Lancelot : d'argent à trois bandes (ou barres) de gueules
  • Bohort : d'hermines à trois bandes de gueules
  • le roi Arthur : d'azur à treize couronnes d'or
  • Gauvain : de pourpre à l'aigle bicéphale d'or

Ms 5024 folio n°6verso



  • Erec : d'or à trois têtes de chiens de gueules languées de sinople
  • Arthur le Petit , fils naturel d'Arthur : de sable à l'arbre d'or
  • Guinglain, fils de Gauvain : d'argent au bâton noueux de gueules
  • Artus le Bloy : de sable à l'épervier d'argent becqué et membré d'or
  • Calogrenant : de gueules à une guivre d'or
  • Brandelis , frère d'Erec : de gueules à trois épées d'argent garnies et pommetées d'azur

Ms 5024 folio n°7

  • Patride le Hardi : d'argent fretté de gueules
  • Hervi de Rivel : de sinople semé de gouttes d'or au léopard d'argent armé et lampassé
    de gueules brochant
  • Esclabor le Méconnu : échiqueté d'or et de gueules
  • Saphar : parti, au premier de vair, au second échiqueté d'or et de sinople
  • Sagremor le Desreez : de gueules à deux étoiles d'or , au franc-quartier d'argent chargé d'une étoile de sable
  • Agravain l'Orgeuilleux : de pourpre à l'aigle bicéphale d'or,becquée et membrée de gueules, à la fasce ( burelle) de sinople brochant sur le tout

Ms 5024 folio n°9verso

  • Galinde du Tertre : d'argent à la merlette de sable
  • Margondes le Rouge : de gueules à six cotices d'or en bande
  • Kaherdins de la Vallée : de gueules à la faux d'or emmanchée de sable
  • Nabon le Fel : d'argent à trois fusées de gueules posées en fasce
  • Talamor le Brillant : de sinople à la colombe d'argent
  • Alibel : parti, au premier mâclé* de sinople et d'argent , au second d'hermine plein
     (*) je dirais plutôt "rustré" , car les losanges sont percés et non pas évidés


Ms 5024 folio n°10

  • Dalides de la Rivière : d'argent à deux dauphins de sable adossés
  • Aran du Pin : de sinople à trois pommes de pin d'or
  • Argaanor le Riche : de sable au chevalier en armes d'or, tenant à dextre une hache de sinople emmanchée de gueules, et portant à senestre une épée de gueules garnie d'or
  • Meliors le Beau Chevalier : fascé, contre-fascé d'argent et de sinople
  • Meliadus le Blanc : de sable à la croix pattée d'or
  • Malaquin le Gros : de pourpre à la bande d'argent chargée de trois lions passants de gueules
On constatera qu'à part les deux premiers feuillets , les chevaliers décrits dans ce petit armorial, sont assez peu connus. Mais ils ont l'avantage de présenter des figures , des associations de couleurs et même des partitions assez peu courantes.

images provenant de la Banque d'Images numérisées de la BnF


la Bataille du Roi Arthur contre Mordred 
manuscrit Ms KA XX folio n° 163 - Koninklijke Bibliotheek van Nederland ( la Haye)
cliquez sur l'image pour agrandir et admirer les détails.

 Mordred (ou Mordret), le traître, était le fils illégitime et incestueux d'Arthur qu'il a eu avec sa demi-sœur Morgause, elle-même sœur de Morgane,  et femme du roi Lot d'Orcanie. Arthur ne l'aimait pas et voulait se débarasser de lui. Après avoir fait partie des Chevaliers de la Table Ronde, il s'est peu a peu discrédité vis à vis des autres chevaliers, par sa fourberie et son manque de loyauté. Il est donc passé à l'ennemi. Lors du combat de Camlann (l'épisode décrit dans l'enluminure ci-dessus) il a blessé mortellement son père Arthur (on le voit étendu dans le chariot à droite, écu "d'or à trois couronnes de gueules") . Mais Arthur avait eu le temps  de répliquer et le tuera net d'un coup de glaive ( sur l'image à gauche).  Le corps du roi sera ramené à Avalon et enterré dans une chapelle. C'est donc la fin de l'Histoire d'Arthur , mais pas de la légende qui continuera avec d'autres héros : Galaad , Gauvain , Perceval , etc....



En 2015, un sujet plus développé et à épisodes sur la légende des Chevaliers de la Table Ronde  a été mis en ligne, voir → ICI  ...  ne le ratez  pas....



Herald Dick

3 commentaires:

  1. Un grand merci !
    J'ai "l'armorial des chevaliers de la Table Ronde" de Pastoureau...mais il y a très peu de blasons !
    François

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  2. Au début Arthur ne se positionne pas a gauche mais a droite

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