vendredi 30 mars 2012

Armorial des îles et des territoires enclavés #05 : la Mer des Caraïbes, les Grandes Antilles

 Après quatre étapes de navigation en Europe, le besoin de mers aux eaux turquoise et de cocotiers se fait plus insistante ! qu'à cela ne tienne,  c'est très facile :  un clic et nous voilà transporté dans la Mer des Caraïbes ! et le transport ne coûte rien ! 
 Sur le plan de l'héraldique,  qui est prétexte, nous restons encore dans l'acceptable. Tous les pays que nous allons découvrir ont eu un passé colonial très important, il en reste des séquelles visibles. Certains, à l'inverse, dont l'histoire fut parfois tragique ont fait table rase de ce passé douloureux et adopté une nouvelle forme d'image de référence.

    Association des États           -                    Cuba                    -                 Jamaïque                   -                     Haïti
             de la Caraïbe         



La Mer des Caraïbes


armoiries attribuées
à Christophe Colomb

 Par où commencer ? eh bien par le commencement de
l'Histoire : 1492. Un navigateur très téméraire nommé Christophe Colomb entreprend de rallier les Indes en allant vers l'Ouest. Il a bien réfléchi son coup depuis des années. Il a offert ses services à toute l'Europe qui ne lui a pas fait confiance (même le Roi de France) et finalement, il a  obtenu les fonds du Roi d'Espagne, c'est la fortune qu'il lui a promis en retour : pas de place à l'erreur. Pourtant il s'est bien trompé : il est arrivé dans des îles complètement inconnues, qu'il nomme pour la première : San Salvador ( Saint Sauveur, le Christ) et dont il prend le pouvoir au détriment des populations locales.  C'est une des îles de l'archipel moderne des Bahamas. Pour l'instant tout se passe bien, on fraternise, mais cela va changer ! 
 





Armoiries nationales des Îles Bahamas (1971)
l'écu porte évidemment la caraque la Santa Maria de C. Colomb, surmontée d'un soleil issant qui a remplacé la couronne du roi Edouard (Angleterre). Les supports sont originaux pour nous, les européens, un espadon sur les vagues de l'océan et un flamant rose dans les marécages. En cimier : heaume à grille de face, tortil et un coquillage marin, des branches de palmier.

Puis après ce premier groupe d'îles ( que je détaillerai dans un épisode annexe) , c'est une grande terre qui est en vue : le Japon , pense Christophe Colomb ?  non : Cuba ...

Armoiries nationales de Cuba  (1902)
établies longtemps avant l'indépendance du pays (1898) , elles ont été le symbole de la revendication à l'autodétermination cubaine à l'étranger. Cuba était une colonie de l'Espagne, puis libérée par une guerre d'indépendance et un moment annexée par les États-Unis. Le faisceau de licteur et le bonnet phrygien, symboles de la Révolution française témoignent de cette accession à la liberté, comme dans beaucoup de pays sud-américains. L'unité de l'état est figurée dans l'étoile à cinq branches, comme dans le drapeau (voir plus haut). L'écu parti,  à dextre : les cinq barres azur et argent représentent les cinq provinces fondatrices, idem dans le drapeau. A senestre et dans le chef : la nature terrestre et marine du pays. La clé symbolise la porte du Nouveau Monde et le soleil : la naissance de la nation. Ici pas de supports exotiques, mais les très classiques branches de chêne et de laurier, pas vraiment des essences locales !    

blason (1505) de l'Île d'Española
(Museo de las Casas Reales -
Saint-Domingue)

A Cuba , Colomb est informé de la présence à l'est d'une autre grande terre. Il repart et arrive à cette île qu'il nomme : la Isla Española (ou Hispaniola) et il "plante" la Santa Maria sur des récifs, le navire est perdu, les marins sont débarqués. Son lieutenant, Alfonso Pinzòn qui avait pris sa liberté depuis plusieurs semaines, avec la Pinta revient,  et l'aventure se poursuit avec les deux navires restant. Mais la population locale est hostile et les marins en ont assez, donc tout le monde rentre à la maison.Ils reviendront plusieurs fois plus tard.
  Nous, nous restons dans l' île de Saint-Domingue, partagée depuis entre deux états indépendants : Haïti et la République Dominicaine.

emblème national d' Haïti  (1807)
ici ce ne sont pas des armoiries, puisqu'il n'y a pas d'écu central. Cet emblème est né de la révolte des esclaves noirs et de la lutte pour l'indépendance du peuple de Saint-Domingue avec Toussaint Louverture, son guide. Soutenu par les idées de la Révolution, puis pas l'Empereur Napoléon Ier  dans un premier temps,  le mouvement qui a permis de dégager les espagnols et les anglais de l'île, au profit des colonisateurs français, a été réprimé lorsque l'idée d'indépendance a émergé, mais la France a finalement perdu la bataille en 1804, tout en  emporté la caisse ! C'est donc un pays libre , mais pauvre qui naît , et pour longtemps...  C'est après les États-Unis, le second territoire colonial qui s'est libéré par lui-même dans l'Histoire du Monde. Tous les symboles de cette époque sont mêlés dans cet emblême, seul, le palmier paraît incongru ! 



Armoiries nationales de la République Dominicaine  (1919 )
Ce pays de langue espagnole est né par la séparation d'Haïti francophone, en 1844, après des épisodes de guerre de libération. Plusieurs modèles d'armoiries ont évolué vers celui que nous voyons.

Juste au nord de cette grande île , nous trouvons un petit archipel très discret répondant au doux nom de Turques et Caïques, bien connu des philatélistes :


Armoiries des îles Turques et Caïques  / Turks and Caïcos Islands  (1965)
Ce territoire britannique d'outre-mer est pourvu d'armoiries très "nature" :
l'écu d'or est chargé d'un coquillage, une langouste et un cactus local appelé "tête de turc"
(Melocactus communis) en raison de son petit chapeau imitant un fez, on suppose que le nom de ces îles vient de cette particularité botanique. Supports : des flamants roses et en cimier un pélican posé sur deux plants de sisal.
Melocactus communis

Poursuivons vers l'est, nous arrivons à une nouvelle île de grande taille : Porto-Rico, la plus orientale des Grandes Antilles.

Armoiries de Porto-Rico  / Puerto Rico  (1511)
Cet état autonome mais pas indépendant, est associé aux États-Unis d'Amérique. Comme Cuba, cette île a été annexée à l'Espagne suite à la guerre entre les deux pays qui a eu lieu 1898. Ces armoiries territoriales seraient les plus anciennes connues du continent américain. On y voit dans l'écu les symboles des Saints Patrons : Saint Jean Baptiste (l'agneau) et Saint Jean l'Évangéliste (le Livre de l'Apocalypse avec les Sept Sceaux). La bordure componnée typiquement espagnole montre les armes du Royaume d'Espagne sous le règne de Ferdinand II d'Aragon et Isabelle de Castille, dont les initiales (F et Y) et les badges personnels (le joug et le faisceau de flèches) sont répercutés à l'extérieur de l'écu. Devise : "Jean est son nom" .

A quelques encablures à l'est de Porto-Rico deux petites îles lui sont associées comme communes (municipio) isolées :


Armoiries de la
Isla de Culebra 
 
Armoiries de la
Isla de Vieques


Maintenant nous virons de bord et cap à l'Ouest pour rejoindre le pays des "reggae nights" : la Jamaïque : Yeh man!

Armoiries nationales de la Jamaïque (1962) 
Cette ancienne colonie britannique est un état indépendant depuis 1962, mais toujours associé à la couronne britannique, donc une monarchie dont le chef d'État est la Reine Elizabeth !
l'écu est aux armes de Saint-Georges (croix rouge) chargée de cinq ananas. Un crocodile (crocodylus acutus) en cimier. Le couple d'indiens Arawaks est là pour la couleur locale , mais l'humanité n'a été très tendre avec eux, puisqu'ils ont été génocidés, tout simplement...
Devise : "Parmi tant d'autres, un peuple" .


On pousse un peu plus loin , vers un paradis célèbre ... mais fiscal : les Îles Caïmans :


Armoiries des îles Caïmans  / Cayman Islands (1958)
C'est un autre territoire britannique d'outre-mer.
 l'écu est composé de trois fasces d'azur  et trois d'argent ,
 et trois étoiles pour figurer les trois îles qui composent
 le territoire. En chef le léopard des armes d'Angleterre.
 Sur le cimier, une tortue marine et un plant d'ananas.
 Devise en anglais ancien: "IL l'a fondée sur les mers". 


Le voyage touche presqu'à sa fin, de retour vers Cuba, nous ne pouvons ignorer cette enclave militaire , au nom synonyme de la répression du terrorisme international : Guantanamo Bay.
 Mais avant d'être cela c'est un territoire que les États-Unis ont conservé après l'Indépendance de Cuba en 1898 , prévoyants qu'ils sont depuis toujours,  et où ils ont installé une énorme base navale stratégique qui a été un enjeu majeur lors de la Guerre Froide.


sceau ou badge (seal) de Guantanamo Bay 

 Un autre territoire américain existe au large des côtes cubaine, jamaïcaine et haïtienne, un îlot inhabité équipé d'un phare qui est revendiqué par l'état d'Haïti : l'Île de de la Navasse ou Navassa Island. Cet atoll a été revendiqué par les États-Unis en 1857 pour l'exploitation  des ressources en phosphates. Les importants gisements de guano de l'île ont été exploités commercialement entre 1865 et 1898.

drapeau non officiel de Navassa Island

À l'autre extrémité occidentale de Cuba , on trouve très près des côtes une autre petite île  : l'Île de la Jeunesse ! joli nom , n'est-ce pas ?

Armoiries de la Isla de la Juventud (Cuba)
on retrouve les figures des armoiries nationales ,
le palmier a juste été remplacé par un arbre
dont j'ignore la nature.


Enfin , pour terminer , comme nous avons beaucoup parlé des États-Unis dans ce dossier nous allons dans les Keys, à l'extrémité sud de l'État de Floride, un chapelet de plus de mille îles en forme de croissant, vestige d'une très ancienne formation de recifs coralliens. 


Aux États-Unis, les armoiries territoriales
(états , comtés, villes, etc...) 
sont très rares. Ce sont ces sceaux ronds
(seals) qui ont la préférence. 
Ils peuvent néanmoins susciter un peu
d'intérêt, comme celui-ci.


A bientôt , pour d'autres terres promises....


Herald Dick


2 commentaires:

  1. Il y a un erreur dans la traduction de la devise de Puerto Rico:"Jean est son nom" .

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  2. Bien vu !
    Impardonnable alors que j'évoque justement les deux saints Jean dans le texte juste au-dessus . Pourquoi ai-je été chercher Jésus , mon Dieu !!

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