jeudi 31 octobre 2019

La chapelle de Sedlec, en République Tchèque, avec son blason macabre : histoire d'Os !

🕷 Nous sommes dans la période de fêtes successives d'Halloween 🎃 🦇, de la Toussaint ⛼, suivies du Jour des Morts 💀; l'ambiance se prête idéalement à ce sujet insolite, macabre et un peu dérangeant, en tout cas difficile à placer pour une autre occasion, il faut bien le reconnaître.
  Pourtant, la raison de la publication de cet article révèle aussi une autre origine, liée à l'actualité, et au développement des réseaux sociaux, vous allez comprendre plus loin. 

Intérieur de la chapelle-ossuaire de Sedlec, dans la municipalité de Kutná Hora, en Bohême centrale, non loin de
Prague  (République tchèque)

Non, vous ne rêvez pas, ce sont bien des armoiries, composées de plusieurs quartiers et les figures qui s'y rattachent,
 surmontées d'une curieuse couronne princière, sommée elle-même d'une croix latine. Le tout est entièrement réalisé en
 combinant et juxtaposant des os humains: fémurs, tibias, os iliaques, sacrums, rotules, clavicules, omoplates, crânes, etc...
L'écu d'armoiries est fixé sur une structure en bois mouluré et derrière apparaissent les empilements du véritable
 ossuaire constitué à la fin du Moyen-âge et à partir du XVIe siècle.
Nous verrons plus bas à quelle famille se réfère le blason, car ce sont de vraies armoiries familiales,
celles des propriétaires historiques des lieux ...
Chapelle funéraire de Tous-les-Saints et cimetière du monastère cistercien de Sedlec, anciennement en allemand Sedletz.
localisation de la ville de Kutná Hora sau centre de la carte de la  République tchèque
Pour accompagner votre visite par une musique "dark ambient" très appropriée, cliquez sur le player (patienter quelques secondes, ça ne commence pas tout  de suite ):


  L'origine de cet ossuaire remonte à celle de l'église de l'Assomption de Sedlec appartenant à l'ordre cistercien. En 1278, le père-abbé est envoyé en Terre sainte par Ottokar II de Bohême et revient de ce pèlerinage avec une poignée de terre provenant du Golgotha qu'il répand sur la surface du cimetière lequel gagne ainsi une réputation de terre sainte propre à assurer le repos éternel en attendant la résurrection.r le Golgotha ​​qu'il a republié sur la surface du film. le repos éternel en attendant la résurrection.
  En 1348, la peste noire frappe durement la Bohême et cette année-là, ce sont quelque trente mille personnes qui y sont enterrées.

l'accès à la chapelle donne déjà la chair de poule...   © www. mywanderlustylife.com
  Après les croisades contre les Hussites (1420-1434), une partie du cimetière est supprimée et les os entreposés près de la chapelle funéraire. Après 1511, la tâche d'exhumer les squelettes et d'empiler leurs os dans la chapelle a été confiée à un moine à moitié aveugle de l'ordre. Les premières mentions d'une décoration avec les os humains de cette chapelle remontent au XVIIe siècle.
 Entre 1700 et 1709, une reconstruction baroque de la chapelle de Tous-les-Saints est entreprise sous les ordres et sur les plans de l'architecte Jan Blažej Santini-Aichel également chargé de la reconstruction de l'abbaye cistercienne dont dépend le cimetière. C'est de cette époque que date la décoration, œuvre de l'atelier du sculpteur pragois Matthias Braun, dont la thématique est tirée du livre Ézéchiel dans la Bible avec un message clair en faveur de la vie éternelle.
   La chapelle, telle que nous la connaissons aujourd'hui, est le résultat de la restauration entreprise en 1870 par le sculpteur František Rint de Česká Skalice, commissionné par les princes Schwarzenberg de Worlik, aujourd'hui Orlík nad Vltavou, alors propriétaires du cimetière, pour mettre de l'ordre dans les tas, ce qui donna ce résultat macabre. Les os ont souvent été disposés de manière artistique pour former des décorations et des meubles pour la chapelle. On estime que l'ossuaire contient les restes de 40 000 à 70 000 personnes.
source texte :  https:// fr.wikipedia.org/wiki/Ossuaire_de_Sedlec

parties du  décor surréaliste, macabre et glauque de l'intérieur de la chapelle ossuaire
 avec ces piliers et ce lustre entièrement composés d'os humains.
  L'ossuaire est l'une des attractions touristiques les plus visitées de la République tchèque, attirant plus de 200 000 visiteurs par an. Mais ils ne respectent pas tous l'importance et le contexte historique de ce monument unique dans le monde, bien au contraire. Jusqu'à 60 000 photos de morts sont créées de manière irrespectueuse, comme des selfies inappropriés et on a des visiteurs qui souvent n'hésitent pas à manipuler et déplacer les os pour créer une photo intéressante. L'impact négatif du tourisme de masse et du comportement de certains visiteurs se traduit par la publication de ces photos et vidéos inappropriées sur divers réseaux sociaux. Les autorités ont donc décidé ces derniers jours de sévir et d'interdire tout simplement les photos à partir du 1er janvier 2020, sauf avec une autorisation spéciale délivrée sur demande à l'avance. C'est cette information qui a été relayée par les sites de web-infos (voir → ICI) et sur le site de la municipalité ( voir → ICI, titre de la notification : Plus de photographie dans l'ossuaire et la cathédrale de Sedlec).


 🛡 Mais revenons à notre sujet héraldique : les armoiries faites d'os sont celles de la très ancienne maison germanique d'origine franque : les Schwarzenberg. Le blason a naturellement beaucoup évolué et s'est enrichi de nouvelles figures au cours de la longue histoire de cette famille. Divisée en deux grandes branches, ses membres les plus illustres ont servi les monarques du Saint Empire, de l'Autriche, de la Bohême et des descendants, toujours en vie occupent encore de très hauts postes dans la vie publique de leur pays, en République tchèque notamment (voir par exemple : M. Karel Schwarzenberg, ancien ministre du gouvernement).

La copie "artistico-funéraire" à gauche, et son original à droite : armoiries des Princes de Schwarzenberg de Worlik

L'écu des armoiries ici isolé, afin de détailler chaque partition.

 Vous pouvez découvrir l'histoire et la description originale du blason de la dynastie familiale → ICI
Mais si vous ne lisez pas, comme je le pense, la langue tchèque, voici une traduction du texte descriptif par Google Traduction (elle vaut ce qu'elle vaut, compte tenu de quelques petites retouches de ma part):


Le blason des Schwarzenberg

Trois étapes de développement:

    1. Le blason original des seigneurs de Seinsheim, originaires de Franconie, était un bouclier à huit pals d'argent et d'azur. Les couleurs ancestrales de l'argent (blanc) et du bleu se retrouvent, par exemple, sur les ornements ou les tentures des châteaux de Český Krumlov et de Hluboká.  Le fondateur de la maison de Schwarzenberg, Erkinger de Seinsheim (1362-1437), fit l'acquisition de la seigneurie de Schwarzenberg au début du XVe siècle. Lui et ses héritiers adopteront progressivement le nom de Schwarzenberg.
la curieuse poignée de la porte du château de Hluboká
    2. Après la conquête de la forteresse turque de Raab (aujourd'hui Győr) en Hongrie le 29 mars 1598 par Adolf de Schwarzenberg (1551-1600), pour le compte de l'empereur Rodolphe II, le 5 juin 1599, le blason s'améliora de sorte qu'au blason d'origine des seigneurs de Seinsheim on y ajouta une figure à la tête de Turc, qui est picorée par un corbeau (pas une corneille - qui n'est pas carnivore).
  Le corbeau est une figure parlante car "Rabe" en allemand désigne à la fois le corbeau et la corneille. Au même moment, le commandant Adolf de Schwarzenberg reçut le titre de comte impérial. Une forme intéressante du corbeau héraldique picorant la tête de Turc se trouve sur la poignée de la porte principale du château de Hluboká (photo ci-dessus).
    3. À la fin du XVIIe siècle, les armoiries de Schwarzenberg ont acquis leur forme actuelle. En 1688, le blason a été modifié, renforcé par les symboles des domaines de Sulz, Brandis et Kleggau, auxquels se sont joints Ferdinand Vilém de Schwarzenberg (1652-1703) par mariage (1674) avec Marie Anne de Sulz.
    4. Les armoiries de la branche de Worlik / Orlík nad Vltavou ont été augmentées en 1814 pour récompenser une victoire sur Napoléon. Un blason impérial d'Autriche chargé d'une épée a été inséré entre les champs supérieurs.

Description des armoiries:
Le bouclier principal est écartelé en 4 quartiers avec un écusson en cœur sur le tout. Ce sont les armes de la branche directe de la lignée : celle de Krumlau (Český Krumlov en tchèque)
Un cinquième quartier avec les armes d'Autriche surmontant l'écusson central ne concerne que la branche des Schwarzenbeg de Worlik (Orlík en tchèque).

    1. Dans le premier champ (en haut à droite) se trouvent les armoiries originales des seigneurs de Seinsheim - huit pals d'argent et d'azur.
    2. Dans le deuxième champ d'argent (en haut à gauche), il y a trois pointes rouges symbolisant le comté de Sulz.
    3. Dans le troisième champ d'argent se trouve une branche écotée enflammée représentant le domaine de Brandis.
    4. Dans le quatrième au champ d'or, un corbeau picorant la tête du Turc vaincu.
    5. Sur l'écusson du milieu, à droite, se trouvent les armoiries du domaine de Schwarzenberg - une tour d'argent posée sur une montagne noire à trois bosses (armes parlantes : Schwarzer Berg en allemand).
    6. Dans l'écusson du milieu, à gauche, se trouvent trois gerbes d'or sur fond d'azur - le landgraviat de Kleggau en Souabe. Kleggau, également marquisat du prince Ferdinand, il fut promu en 1689 au rang de landgraviat, après avoir été médiatisé lors des guerres napoléoniennes de 1812, mais le titre et le blason restèrent inchangés.
    7. Deux lions d'or apparaissent rarement comme porteurs de bouclier.
    8. La couronne princière au-dessus des armoiries marque le titre princier, obtenu en 1670 par Jan Adolf I, comte de Schwarzenberg (1615-1683).
    9. La devise des Schwarzenberg est en latin "NIL NISI RECTUM" (en traduction : Rien d'autre que tout droit).


blason de la commune tchèque d'Orlík nad Vltavou,
reprenant deux des figures du blason des Schwarzenberg


🦴 Pour compléter votre information vous pouvez encore consulter ces liens :

www.sedlec.info/en/  (site officiel , langues : ENG / CZ)
-  fr.wikipedia.org/wiki/Ossuaire_de_Sedlec
-  generationvoyage.fr/visiter-kutna-hora-ossuaire-sedlec/
-  www.neverends.net/lossuaire-de-sedlec/
-  www.youtube.com/watch?v=fPxQoRVUU2U ( ► video , langue : ENG)
-  de.wikipedia.org/wiki/Schwarzenberg_(fränkisch-böhmisches_Adelsgeschlecht) (langue : DE)
-  en.wikipedia.org/wiki/House_of_Schwarzenberg#Imperial_immediate_estates (langue: ENG)


💶 Crédits images :
- Passez votre souris sur les photos ou images, pour lire la provenance de chacune.


     (very scary) Old Dick


jeudi 24 octobre 2019

l'Armorial de La Planche - 1669 - Gouvernement de Lyonnais - Sénéchaussée du Haut Auvergne

 S   uite de la visite d'un des plus anciens manuscrits répertoriant des armoiries de villes et de villages de France, dessinées à la plume et peintes à l'aquarelle, antérieur de trois décennies à l'Armorial Général de France de Charles d'Hozier ! Voir la description initiale : →

  Nous poursuivons avec la découverte du "livre" (c'est l'appellation donnée à une section d'un manuscrit, qui est lui-même divisé en chapitres) consacré au Gouvernement de Lyonnais.  Après les  chapitres dédiés successivement aux Sénéchaussées du Lyonnais, du Forez, de Beaujolais et Dombes, du Bourbonnais, de la Marche, nous atteignons maintenant une très grande province historique de France : l'Auvergne . Il apparaît donc que plus de trois siècles avant la grande réforme des Régions adoptée en 2015, qui fit couler beaucoup d'encre, l'Auvergne et le Lyonnais étaient déjà réunis dans la même entité administrative ! Le territoire de cet ancien Comté et ancienne province, abrogée sous la Révolution, était alors divisé en deux sénéchaussées : Bas Auvergne et Haut Auvergne, faisant l'objet de deux chapitres distincts dans le manuscrit. Nous avons traité de la sénéchaussée du Bas Auvergne sur deux volets précédemment. Nous arrivons maintenant au septième et ultime consacré à la sénéchaussée du Haut Auvergne. Son territoire couvre la presque totalité du département actuel du Cantal exceptées quelques communes du nord-est autour d'Allanche, rattachées à la sénéchaussée du Bas Auvergne

      Revenir à l'épisode précédent →


 On constate que Robert Louis a utilisé vers 1949, ce blason ci-dessus au griffon coupé de gueules et de sinople pour la création des armes du département du Puy-de-Dôme (qui n'ont jamais été officialisées).
  L'origine de ce griffon semble très obscure;  ce seraient les armes des anciens comtes d'Auvergne, comme l'a rapporté Maistre Louvan Geliot, advocat au parlement de Bourgogne dans son ouvrage imprimé en 1635 à Paris : Indice armorial , ou Sommaire explication des mots usitez au blason des armoiries.... , pages 208 et 210,  voir en ligne cet exemplaire conservé à la BNF → ICI.


 Voici l'extrait d'une carte datant de la fin du XVIIIe s. , donc postérieure d'un siècle, mais sur laquelle j'ai reconstitué les limites administratives de notre région :
 Vous pouvez cliquer sur toutes les images pour les agrandir










   Les fragments de manuscrits proviennent toujours du Volume II. Pour enrichir l'étude, j'ai mis en bonus l'extrait équivalent dans l'Armorial Général de France* (1696-1711), établi par Charles-René d'Hozier, et comme auparavant, j'ai placé le blason actuel en-dessous, pour comparer les différences ou au contraire la constance des figures dans le temps.
                 
                (*)  Armorial Général de France  -  volume II  -  Généralité d'Auvergne   (BNF Paris)  
                    
Saint - Flour (Cantal)

  Ce blason pourrait être une combinaison/brisure des anciennes armes de l'abbaye d'Aurillac et de la maison de France. C'est aussi un blason très proche de celui de Jean, duc de Berry, comte d'Auvergne, qui racheta en 1392 la vicomté de Carlat.  source texte : https://fr.wikipedia.org/wiki/Saint-Flour_(Cantal)#Héraldique
  On remarquera que Pierre de La Planche a utilisé un parti d'azur et de gueules (?) au lieu d'or, le semé de lis est entièrement d'or et il n'a pas dessiné de bordure de gueules. On est en droit de dire qu'il s'est trompé, car un manuscrit plus ancien de quelques décennies nous rétablit l'image du blason déjà connu à cette époque, voir → ICI  (folio 110v).


Aurillac (Cantal)

  Les anciens seigneurs d'Aurillac adoptèrent comme armes trois coquilles aussi appelées jadis "oreilles" de Saint Jacques, jouant ainsi avec des armes parlantes : oreilles / Aurillac.
Les fleurs de lis sont une concession postérieure du roi Charles VII.


Salers (Cantal)


  Il semblerait que la tour avec son avant-mur accolé, proposé par l'auteur du manuscrit,  proviendrait des armes supposées de la très ancienne seigneurie de Salers , voir sur cette fiche de la Société Historique locale → ICI.  L'évolution du blason montre qu'il y a eu beaucoup de changements, la tour étant le seul point commun.



Mauriac (Cantal)

  Très souvent, on l'a déjà vu, l'auteur du manuscrit a préparé comme ici,  un emplacement pour y dessiner les armoiries des villes pour lesquelles il a rédigé un descriptif. Mais les écus sont restés désespérément vides. Nous en ignorons la raison : manque d'information fiable, manque de temps, on ne le saura jamais.
  La ville a adopté au XIXe siècle le blason parlant avec le maure en pied de sable sur champ d'or, créé par Charles d'Hozier dans l’Armorial Général de France, établi à partir de 1'édit royal de 1696. Selon Louis de Ribier, historien du Cantal, le véritable blason de la ville de Mauriac serait une tête de maure de sable sur champ d'or. Hypothèse non avérée, voir commentaires → ICI.
  On remarquera plus bas dans cette page, que le bourg de Maurs, situé dans le même département du Cantal, plus au sud, a reçu les mêmes armes parlantes et le même dessin d'armoiries, également attribuées par Charles d'Hozier, manquant ainsi cruellement de créativité !




[_)-(_]





D'autres lieux ou villes sont juste décrits par le texte :

- avec un contour de blason vide, et sans description, comme pour Mauriac : Murat, Carlat, Chaudes-Aigues, Massiac, Montsalvy.

- sans blason ni mention s'y rapportant :  Pleaux, Pierrefort, Vic (-sur-Cère), Maurs, (La)Roquebrou, Marcolès.

 # cependant, quelques années plus tard, certaines villes (en gras, ci-dessus) ont été enregistrées et blasonnées dans l'Armorial Général de France.  Ces blasons sont encore d'actualité, pour certains, à quelques détails près :

Murat (Cantal)

Chaudes -  Aigues (Cantal)

Vic -sur- Cère (Cantal)

Maurs (Cantal) - deux variantes répertoriées



# et pour aller plus loin avec l'Armorial Général de France, on peut encore rajouter ces quatre établissements religieux ainsi qu'une paroisse qui dépendaient de cette sénéchaussée, et qui n'ont pas été mentionnés dans le manuscrit de La Planche. Leurs armoiries ont été transférées plus tard, en totalité ou brisées, aux communes sur le territoire desquelles ils étaient situés, à savoir aujourd'hui les communes de:
Condat-en-Feniers, Glénat, Saint-Constant, Saint-Illide, Saint-Saury.

et leurs blasons respectifs qui sont toujours d'actualité, à quelques détails près.


commune de Condat -en- Feniers 
 (Cantal)

commune de Glénat
 (Cantal)

commune de Saint - Constant
 (Cantal)

commune de Saint - Illide 
(Cantal)

commune de Saint-Saury
(Cantal)



A bientôt pour une nouvelle série et ...
 une nouvelle région... ICI



Crédits :
les blasons "modernes" sont empruntés  à : armorialdefrance.fr/

les extraits des manuscrits proviennent de :
- Bibliothèque et Archives du Musée du Château de Chantilly :
   . www.bibliotheque-conde.fr/ressources-en-ligne/

 - Bibliothèque nationale de France à Paris : 
   . gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k111461c/


💶 Appel au mécénat ou aux généreux donateurs :
 Au cours d'échanges d'informations avec les responsables de la Bibliothèque du Musée Condé, au sujet du manuscrit, il m'a été rapporté que l'ouvrage de Pierre de La Planche n'est actuellement plus exposé ni mis à disposition des visiteurs. En effet, les deux volumes du manuscrit sont en mauvais état : "la couverture", ce que l'on nomme dans le métier: les plats de reliure, sont soit partiellement,soit totalement détachés du manuscrit, ce qui nuit à sa conservation. La reliure étant en effet là pour maintenir et protéger le manuscrit.
  Si des personnes ou des entreprises sont intéressées, en mode mécénat, pour participer à la prise en charge de la restauration de ces précieux ouvrages, qu'elles prennent contact pour les modalités, avec les bibliothécaires à cette adresse mail  : bibliotheque@domainedechantilly.com
ou sinon m'écrire à : heraldexpo@orange.fr et je transmettrai à ma correspondante privilégiée.


             Herald Dick  
.


jeudi 10 octobre 2019

Capitales du monde : Bichkek

 ⨷ n avait stoppé notre parcours guidé par l'ordre alphabétique, la dernière fois à Beyrouth, ville dont le nom est connu de tous. Cette fois, tout en restant en Asie, nous allons nous rendre dans une capitale d'1 million d'habitants tout de même, mais dont le nom peut laisser perplexe d'ignorance car il est rarement cité dans l'actualité et surtout il a changé plusieurs fois dans l'histoire.

  La ville de Bichkek est représentée officiellement depuis 1994 par un emblème de type logotype, bleu, formé d'un rectangle évoquant une tour crénelée. Depuis que Pichpek (le premier village du lieu) est devenu une forteresse au début du XIXe siècle, la tour symbolise la force et le pouvoir. La base du rectangle est coupée par une ligne en zig-zag et une autre droite. La première symbolise la chaîne de montagnes d'Ala-Too, qui est la partie nord du massif de hautes montagnes d'Asie centrale : le Tian-Shan . La ligne droite représente le fleuve Tchou qui marque la frontière avec le Kazakhstan voisin au nord.
  Sur le haut du rectangle bleu est placé un carré blanc bordé de bleu, posé sur une pointe s'insérant entre les deux sommets de la "montagne" stylisée. Il contient un cercle bleu dans lequel est inscrit la figure stylisée d'un félin blanc tacheté. 
   Le léopard des neiges (Panthera uncia), puisque c'est de lui qu'il s'agit, est un symbole de courage, de volonté, d'endurance et est l'un des anciens totems du peuple Kirghiz. Le cercle et le carré, dans lesquels est inscrit le léopard blanc, signifient l’unité du temps (cercle) et de l’espace (carré), selon l’ancienne idée kirghize de l’intégrité. De plus, le cercle à l'intérieur du carré symbolise quatre valeurs: la personne, la culture, l'écologie et l'économie.
En dessous est placé le nom de la capitale écrit en alphabet cyrillique : " БИШКЕК ".

Quelques variations constatées du logo créé en 1994, dont le dernier rappelant la date d'accession au statut de ville sous l’Empire russe.

le léopard ou panthère des neiges, gros félin emblématique mais rarement observable des hautes montagnes d'Asie centrale.

capitale n° 31 - Bichkek


Bichkek,  en anglais: Bishkek, en kirghize et en russe : Бишкек , est la capitale et la ville la plus peuplée du Kirghizistan.

Population  :  1.012.500 habitants en 2019 (estimation).

  Située dans la vallée du fleuve Tchou (ou Chu), dans le nord du pays, Bichkek est un centre industriel (machines agricoles, denrées alimentaires, textiles, matériaux de construction) et administratif. A proximité se trouve l'aéroport international de Manas. Elle est également le siège de l'université d'État kirghize et de l'Académie kirghize des sciences, elle accueille un orchestre symphonique et plusieurs musées et théâtres. Les Russes, qui constituaient l'ethnie majoritaire, ont vu leurs effectifs décroître ces dernières décennies car beaucoup d'entre eux ont émigré en Russie, tandis que les Kirghizes ont vu leur population fortement augmenter et sont devenus l'ethnie prédominante.
la Place Ala-Too au centre de la ville, avec une statue monumentale :  Erkindik, dite "la statue de la liberté" qui a remplacé
 en 2003 celle de Lénine qui elle a été déplacée dans un autre endroit.
  La ville a pour origine une forteresse construite au milieu du XIXe siècle par les khans de Kokand dans un lieu-dit nommé Pichpek. En 1862, elle est détruite par les Russes qui construisent à sa place un poste militaire à partir duquel ils entreprennent la colonisation de la région. En 1878, Pichpek accède au statut de ville de l'Empire russe. Le vrai démarrage économique de la ville a lieu lors de l’établissement en 1924 d’une liaison ferroviaire avec Moscou. Pishpek devient le centre administratif de la région autonome (oblast) de Kara-Kyrgyz. En 1926, Pichpek est baptisée Frounzé en l'honneur d’un général de l’Armée rouge natif de la ville. En 1936, Frounze devient la capitale de la nouvelle république socialiste soviétique (R.S.S) de Kirghizie puis, en 1991, celle du Kirghizstan indépendant. En 1991, le Parlement kirghize lui donne le nom actuel de Bichkek.



De Pichpek à Bichkek ...

 

Sous l'Empire russe et pendant la Révolution bolchévique : la ville s'appelait Pichpek ...




armoiries de la ville de Pichpek : version non colorisée
armoiries de la ville de Pichpek : version colorisée

Oblast de Semirechensk -1867/1924

 Les armoiries de Pichpek furent officiellement approuvées le 19 mars 1908 :
⛨ Écu français encadré par deux épis de blés d'or entrelacés dans le ruban rouge de l'Ordre de Saint Alexandre Nevski. Le sommet de l'écu est timbré d'une couronne de ville en forme de tour forteresse à trois branches (merlons), marque des chefs-lieux de l'Empire russe. Dans le canton supérieur droit de l'écu se trouvent les armoiries de la région (oblast) de Semirechensk, dont dépendait le comté de Pichpek.
 Blason : Écu d'azur à la fasce d'argent chargée de trois socs d'azur - un symbole de l'agriculture - et accompagnée de deux abeilles d'or - un symbole du travail acharné.

Durant la période soviétique : la ville s'appelait Frounze ...

 ☭  Pendant une longue période consécutive à la Révolution russe (1917) et durant toute l'époque administrée par le régime communiste, les armoiries, assimilées à l'aristocratie et à l'ancien régime impérial ont été bannies. Toutefois, vers la fin des années '1960, quelques villes commencent à arborer de nouveaux emblèmes au style très reconnaissable, non héraldique et plus proches du logo, malgré une forme généralement en écu...

portrait de Mikhaïl Vassilievitch Frounze
 sur un timbre émis par l'U.R.S.S en 1985
 Commandant militaire soviétique, né à Pichpek
qui sera renommée Frounze en sa mémoire
 par le Présidium du Comité exécutif
central de l'URSS le 12 mai 1926.
 
Pin's ou badge avec emblème spécial créé en 1978
en souvenir du centenaire de la ville de Frounze 
Фрунзе en cyrillique écrit sur fond rouge )
Il représente au centre d'un cercle vert un bichkek
sculpté (pilon kirghize pour mélanger le koumis ), et
 deux feuilles de vigne (en roumain frunze signifie
une feuille).
carte postale datant de 1985  montrant le bâtiment de style stalinien de la Philharmonie de Frounze, devant lequel se dresse
 sur une colonne, une statue équestre de Manas, héros légendaire national.

Pin's commémoratif de la ville de Frounze avec le
 cavalier Manas combattant un dragon
autre pin's avec cette fois le blason soviétique
 de la ville de Frouze, créé en 1978
🛡  Les "armoiries" de la ville de Frounze ont été approuvées le 22 septembre 1978 par le conseil des députés du peuple de la ville.
  Au centre, un ornement national kirghize, sous la forme d’une fleur avec cercle rouge (parfois bleu ouvert) au centre, entourée d’une couronne de feuilles vertes (trois à droite et trois à gauche), reliées en bas par un segment d’engrenage. La fleur et les feuilles vertes reflètent l'importance des espaces verts dans la cité-jardin. Le morceau d'engrenage est un symbole du développement industriel de la ville. Au-dessus de l'ornement central, se trouve une nouvelle image d'un bâton nommé bichkek (voir son rôle plus bas), rappelant l'ancien nom de la ville : Pichpek. Au-dessus le dessin délimite les pics blancs des montagnes environnantes avec l'inscription en alphabet cyrillique de «ФРУНЗЕ (FRUNZE)».

Armoiries de la ville de Frounze de 1978 à 1991
version numérique (Wikipedia)
motifs ornementaux traditionnels kirghizes présents sur de nombreux supports : tissus, tapis, vêtements, bijoux, etc...


le bichkek, c'est cet objet, un bâton sculpté utilisé pour confectionner la boisson
 locale : le koumis à partir de lait de jument ou de chamelle, fermentée et alcoolisée,
et qui a donné son futur nom à la ville en  raison d'une légende ancienne :
la forteresse originelle aurait été bâtie à l'endroit même où une fille kirghize
qui était descendue des montagnes aurait laissé tomber et abandonné un bishkek.

exemples de vrais bichkeks en bois brut, non ouvragés.


  après l'indépendance de la République du Kirghizistan et jusqu'à aujourd'hui, la ville est renommée Bichkek ...

🏴  En avril 1991, le Conseil suprême de la République du Kirghizistan a renommé Frounze en Bichkek. Le changement de nom de la capitale du Kirghizistan a été expliqué comme un rejet du régime communiste totalitaire et impliquait de repenser l'histoire du Kirghizistan pendant la période soviétique. L'abandon du nom «Frounze» a été vu comme le refus démonstratif des dirigeants kirghizes du passé soviétique commun. Il s’agissait aussi d’abolir la position dominante d’un groupe ethnique parmi les nombreux qui vivaient à cette époque au Kirghizistan.

Armoiries de la ville renommée Bichkek en 1991
le nom cyrillique de la ville a donc été actualisé
Exemple d'emploi de l'emblème de la ville sur le
mobilier urbain, avec des couleurs différentes


le drapeau de la ville de Bichkek avec le nouvel emblème au léopard des neiges (1994)

🐆  Le symbole de la panthère des neiges devient finalement celui de la ville que les habitants se sont approprié, comme l'ours l'est pour Berlin ou Berne ou encore la sirène de Varsovie, le lion ailé de Venise, etc... Il est notamment décliné pour illustrer de nombreux évènements et sur des emblèmes locaux.


timbre et bloc philatélique (ci-dessous) émis en 1999 pour commémorer les championnats
 mondiaux de kickboxing organisés à Bichkek : notre panthère s'est mise à la boxe !

emblème du Football Club Alga de Bichkek
emblème du Ilbirs Football Club de Bichkek
Илбирс (Ilbirs) en kirghiz signifie "panthère"


🏙 Si vous voulez faire une petite visite de la ville et de ses principaux monuments, cliquez → ICI
      (site officiel de la municipalité, en kirghiz et en russe).

Si après cela , vous dites encore que vous ne connaissez pas la capitale du Kirghizstan, alors je ne sais plus quoi faire pour vous !




Crédits :
choix des images:
- passer votre souris sur les images pour lire les url des sites sur lesquels elles ont été empruntées


capitale précédente  →   Beyrouth

capitale suivante     →   Bissau