dimanche 23 avril 2017

Top 10 des plus grandes villes de Serbie avec leurs blasons

Voici un nouveau volet à cette série consacrée à la découverte de l’héraldique civique, à travers divers pays du Monde. Le principe du "Top xx" très répandu dans les médias et sur Internet, pour recenser ce qui est le plus remarquable dans un domaine particulier est ici adapté à cette thématique. Il nous permettra de découvrir ou réviser la géographie d'un pays choisi de manière aléatoire et dans le même temps de s'intéresser à sa diversité en matière de blasons et emblèmes municipaux.


  Nous restons en Europe, à la rencontre d'un pays qui fait la jonction entre l'Europe centrale et les Balkans : la Serbie.



  Voici donc les 10 plus grandes villes en terme de population, en-dehors des grosses aires urbaines, mais aussi indépendamment des communes administratives du même nom, qui regroupent plusieurs villes et localités ensemble (chiffres : 2011).
 Je précise aussi, comme le montre la carte officielle ci-dessus, que l'indépendance du Kosovo ayant été reconnue en 2008 par la plupart des pays d'Europe occidentale, dont la France, et ce malgré la position du gouvernement serbe qui refuse cette séparation, je n'ai pas inclus la ville de Pristina, capitale du Kosovo, qui serait sinon la cinquième ville dans ce classement.

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1 - BELGRADE / Beograd / Београд

capitale de la République de Serbie, et chef-lieu du district de la Ville de Belgrade (Град Београд/Grad Beograd) - 1 344 840 habitants


ancienneté des armoiries avec cette composition : 1931

Cette ville a fait l'objet d'un article plus détaillé dans la série des capitales → ICI



2 - NOVI SAD / Нови Сад

- anciens noms : Neusatz / Újvidék (Autriche; Autriche-Hongrie, 1699-1918)
- capitale de la province autonome de Voïvodine (Војводина/Vojvodina) et chef-lieu du district de Bačka méridionale (Јужнобачки округ/Južnobački okrug) - 286 160 habitants



ancienneté des armoiries : 1748




3 - NIŠ / Ниш

chef-lieu du district de Nišava (Нишавски округ/Nišavski okrug) - 202 210 habitants



ancienneté des armoiries : 1996



4 - KRAGUJEVAC / Крагујевац

chef-lieu du district de Šumadija (Шумадијски округ/Šumadijski okrug) - 150 835 habitants


ancienneté des armoiries : 1996

Cette ville a été citée dans un article sur les symboles de la mythologie et de l'Antiquité → ICI



5 - LESKOVAC / Лесковац

- ancien nom : Dubročica
- chef-lieu du district de Jablanica (Јабланички округ/Jablanički okrug) - 110 240 habitants



ancienneté des armoiries : 2005




6 - SUBOTICA / Суботица

- anciens noms :  Maria-Theresienstadt, Maria-Theresiopolis ou Maria-Theresiopel / Szabadka (Autriche; Autriche-Hongrie, 1699-1918)
- ville de la province autonome de Voïvodine (Војводина/Vojvodina) - chef-lieu du district de Bačka septentrionale (Севернобачки округ/Severnobački okrug) - 105 680 habitants


ancienneté des armoiries : 1779



7 - ZRENJANIN / Зрењанин

 - anciens noms : Großbetschkerek / Nagybecskerek (Autriche; Autriche-Hongrie, 1718-1918), Bečkerek / Veliki Bečkerek (royaume des Serbes, Croates et Slovènes 1918-1929; Yougoslavie 1929-1945)
- ville de la province autonome de Voïvodine (Војводина/Vojvodina) - chef-lieu du district du Banat central (Средњебанатски округ/Srednjebanatski okrug) - 76 510 habitants


ancienneté des armoiries : 1769



8 - PANČEVO / Панчево

- anciens noms : Pantschowa / Pancsova  (Autriche; Autriche-Hongrie, 1718-1918)
- ville de la province autonome de Voïvodine (Војводина/Vojvodina) - chef-lieu du district du Banat méridional (Јужнобанатски округ/Južnobanatski okrug) - 76 200 habitants


ancienneté des armoiries : 1881




9 - ČAČAK / Чачак

chef-lieu du district de Moravica (Моравички округ/Moravički okrug) - 73 330 habitants



ancienneté des armoiries :  ?



10 - KRALJEVO / Краљево

- anciens noms :  Rudo Polje, Karanovac, Rankovićevo (avant 1882)
- chef-lieu du district de Raška (Рашки округ/Raški okrug) - 64 175 habitants



ancienneté des armoiries : 1997




• On peut constater dans un premier temps que les dates d'adoption des armoiries sont pour certaines très récentes et en particulier celles des villes des parties centrale et méridionale de la Serbie et qui correspondent grosso-modo aux contours historiques de l'ancien royaume de Serbie, avant la Première Guerre mondiale, mais sans le Kosovo et la Macédoine slave.
"Blason" communiste de la ville de Kragujevac
  C'est du reste une particularité commune à la plupart des pays de la péninsule balkanique où l'héraldique civique est arrivée tardivement, après la chute progressive des blocs communistes à partir de 1990, puis le renouveau des nationalismes qui a suivi, entraînant les graves conflits lors de l'éclatement de "l'ex-Yougoslavie" avec le redécoupage des frontières, fragile et toujours sujet à des embrouilles inter-ethniques et inter-nationales. 
  Néanmoins il n'y avait pas pour autant le néant total auparavant, car quelques grandes cités de l'ex-Yougoslavie communiste arboraient des emblèmes non héraldiques, comme celui reproduit à droite. Certaines les ont même gardé.

• Plus au nord du pays, au-delà de la limite du Danube et de son affluent la Save, s’étend un territoire appelé aujourd'hui  "province autonome de Voïvodine", qui a voté son rattachement à la Serbie après l'armistice du 11 novembre 1918. En effet, pendant plusieurs siècles auparavant, cette province, à forte majorité ethnique serbe à l'ouest, hongroise au nord-est, fut sous la domination des Habsbourg d'Autriche, mais aussi plus tard une possession du royaume de Hongrie, et enfin de l'Empire Austro-Hongrois jusqu'en 1918, avec comme noms de régions : le Banat et la Bačka.
Grandes armoiries de la ville de Niš avec deux personnages
historiques qui ont marqué l'histoire de la ville  comme supports
et porte-bannières : à dextre :  Stevan Sinđelić (1770-1809)
 patriote serbe qui a dirigé la première révolte contre l'occupant
ottoman et qui tient la bannière aux couleurs de la Serbie,
et à senestre l'Empereur romain Constantin le Grand (272-337),
natif de Niš (jadis : Mésie) tenant une bannière pourpre avec
une aigle impériale bicéphale préfigurant l'emblème de l'Empire
byzantin. Le monogramme ( chrisme) au-dessus de la couronne
murale qui caractérise symboliquement Jésus-Christ  fut porté
la première fois sur les étendards de Constantin, premier empereur
 romain converti au christianisme, qui le porta comme protection
divine dans une bataille contre son rival de Rome :  Maxence.
 Cette colonisation austro-hongroise a donc fourni, avec l'attribution des chartes royales aux grandes villes de cette province, un certain nombre d'armoiries (voir les villes n° 2, 6, 8).
 Durant la période communiste de la Fédération de Yougoslavie , de 1945 à 1990, toutes ces images de l'ancien régime ont été bannies et remplacées par d'autres symboles plus appropriés à la doctrine socialiste.
 Mais depuis la chute du Mur de Berlin, la plupart des armoiries historiques ont été réadoptées et modernisées, avec si besoin, l'assentiment et l'aide d'un organisme d'état créé en 1991 : la Société d'Héraldique serbe (Српско хералдичко друштво Бели орао). 
• Cette intéressante institution, à la manière du College of Arms britannique, s'attache à faire respecter les principes et les règles fondamentales de l'héraldique, promouvoir un dessin artistique de grande qualité, à toutes les demandes de création, qu'elles soient d'origines institutionnelles, étatiques, territoriales, corporatives ou familiales. Du reste dans cet esprit de normalisation, les villes qui adhèrent au principe de la charte héraldique pour leur communication, se voient proposer plusieurs niveaux d'armoiries : les petites (écus simples sans ornements, comme celles que je vous ai proposées dans ce top 10), les moyennes , avec au minimum une couronne civique (murale) ou autre, un listel et quelques légers supports végétaux... et enfin les grandes armoiries  où sont rajoutés le maximum d'ornements : cimiers, supports, tenants, soutiens, terrasses, bannières aux couleurs des entités administratives, devises, etc... On y peut rajouter aussi les drapeaux et bannières municipales, très souvent ornés d'armoiries.  Le résultat est assez fantastique, à l'image de nombreux pays de l'Europe de l'est qui ont redonné à l'héraldique civique, mais pas uniquement, un nouveau souffle qui ne peut que réchauffer le cœur des amateurs que nous sommes, en nous sortant des vieux armoriaux poussiéreux pour admirer de belles créations qui ont le mérite d'être réellement exposées au public et non pas gardées dans un tiroir.

Croix serbe
 • Retour à notre Top 10 : parmi les symboles historiques et patriotiques, au premier rang arrive la "Croix serbe" (armes de la Serbie, villes n° 4 et 9). La Croix serbe est directement inspirée de la Croix byzantine : les souverains serbes se considéraient comme les "enfants de l'empire romain d'orient". Les lettres grecques stylisées β (Bêta), représentant la devise impériale en grec :  Βασιλεὺς Βασιλέων Βασιλεύων Βασιλευόντων  translittéré en 'Basileus Basileon Basileuon Basileusin' en français : "Roi des rois, régnant sur des rois". Le « Roi » étant Jésus-Christ. Il existe d'autres interprétations des quatre lettres, comme assimilées à la lettre C de l'alphabet cyrillique serbe, ce seraient les initiales "S" pour "Само Слога Србина Спасава" en serbe latin 'Samo Sloga Srbina Spasava', qui se traduit en français par :  "Seule l'union sauve les Serbes".
• La hure de sanglier transpercée d'une flèche (ville n°4), qui représentait le peuple antique des "Triballes" puis la Serbie médiévale dans les armoriaux anciens, est un symbole identitaire récupéré par les patriotes serbes en lutte contre l'occupation du pays par l'Empire ottoman, entre 1804 et 1813. Il est très courant dans l'héraldique civique serbe.

• L'aigle bicéphale rouge sur l'écusson de la ville n°5 rappelle le moment historique où en 1163, Stefan Nemanja (fondateur de la dynastie des rois serbes Nemanjić) reçut en fief la ville et les terres de Dubročica (future Leskovac) de la main de l'empereur byzantin Manuel Ier Comnène et le titre de župan (équivalent à celui de seigneur). L'aigle rouge est le symbole des despotes (un autre titre aristocratique byzantin). L'aigle bicéphale deviendra avec les couleurs inversées : argent sur champ de gueules, l'emblème des Nemanjić (voir les armes actuelles de la Serbie et de la ville n° 3).

• Le blason de la ville n° 10, avec ses sept couronnes, fait référence aux sept rois de la Serbie médiévale (dynastie Nemanjić) couronnés au monastère de Žiča, et le nom de Kraljevo signifie par ailleurs "la ville des rois".

• Au titre des symboles religieux : deux blasons méritent qu'on s'y arrête:
anciennes armes de Maria-Theresiopolis (Subotica)
  datant de 1779, période habsbourgeoise de la ville
-  La ville n° 6 montre dans le quartier supérieur à dextre une Vierge à l'Enfant assise sur une nuée d’argent et nimbée d'une grande auréole rayonnante d'or, et à senestre une représentation de Sainte Thérèse en habits de carmélite, elle aussi nimbée d'une auréole rayonnante d'or plus petite et désignant du doigt l'apparition de la Vierge Marie en face d'elle. Il s'agit en fait d'armes parlantes ! En effet en 1779, l'impératrice d'Autriche Marie-Thérèse (1717-1780) dota la ville du statut de "ville libre royale" ; en remerciement, les habitants de Subotica donnèrent à leur ville le nom de Maria-Theresiopolis ou en allemand Maria-Theresienstadt, la ville de Marie-Thérèse.
  Le quartier inférieur "de gueules au lion d'or brandissant un sabre d'argent" est aux armes de l'ancienne province du Banat autrichien.

- Le blason de la ville n°7 est à lui seul une image religieuse, une icône. Comme précédemment, c'est l'impératrice Marie-Thérèse d'Autriche qui a donné son statut de ville de marché à Veliki Bečkerek (Gross Betschkerek) comme elle s'appelait à l'époque, ainsi que sceaux et armoiries. La scène représente la Dormition de la Vierge. Celle-ci est étendue dans son sarcophage, sur un dallage de gueules, encadré de deux chandeliers allumés d'or et entourée des apôtres, tous d'argent et nimbés d'or. Au-dessus elle est représentée montant dans le ciel d'azur, nimbée d'or, sur une nuée d'argent et accompagnée de deux chérubins brochant sur des rayons d'or. La fête de la Dormition est la plus importante des fêtes de la Vierge Marie, et c'est elle qui clôt l'année liturgique du rite byzantin.
• Pour finir avec cette ville n°7, le nom actuel de Zrenjanin, lui a été donné en 1946, en l'honneur de Žarko Zrenjanin Uča (1902-1942), qui fut le chef des Partisans communistes de Voïvodine pendant la Seconde Guerre mondiale. Torturé et incarcéré par les nazis, il fut tué en tentant de leur échapper.

• Pour la capitale, Belgrade, et concernant l'historique des ses armoiries je vous invite à revoir les deux sujets spéciaux que j'avais réalisé en 2015 → ICI et  ICI



Si vous désirez en savoir plus sur le pays : la Serbie et ses emblèmes, c'est → ICI

A bientôt, pour un nouveau pays ... → ICI


Et pour revoir le pays précédent ...  → ICI





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